Depuis qu’elle a perdu son mari, Rose vit seule avec John Brown, son chien. Jusqu’à ce qu’apparaisse un chat que Rose nourrit de lait mais que le chien, emporté par la jalousie, va s’employer à écarter de sa maîtresse. «– Regarde, John Brown, le voilà, le vois-tu maintenant? – Vous n’avez pas besoin d’un chat, disait-il, vous m’avez moi!» (oui, le chien parle) «Et chaque, soir, quand Rose ne regardait pas, John Brown d’un coup de patte, renversait le bol.»

Quelle jolie surprise et quel plaisir de relire cette histoire que j’avais tant aimée quand j’étais petite, mais en rien dépassée aujourd’hui («comme toi d’ailleurs», précise ma gentille collègue). Les thèmes de la vieillesse, de la jalousie, de l’affection, de la place qu’on peut accorder à l’autre sans perdre la sienne sont bien sûr intemporels, mais l’est aussi dans cet album l’équilibre subtil entre les mots si justes et les illustrations si délicates.

Merci aux éditions de l’ ne Bâté qui permettent à ce petit chef-d’œuvre, sorti une première fois en 1978 aux Deux Coqs d’Or, de refaire surface. Nul doute qu’il saura séduire les jeunes lecteurs d’aujourd’hui, amateurs d’histoires tendres où l’on se pose des questions.

Librairie La Boîte à Histoires à Marseille

Être doté de super-pouvoirs, on en rêve tous, et Mat, Lili et Benji ont cette «chance»! Mais comme par ailleurs ils viennent d’emménager dans une nouvelle ville, il serait bien de ne pas attirer l’attention dès la rentrée des classes... Sauf – tout le monde sera d’accord – qu’il y a des situations où il est difficile de se conformer à cette règle, par exemple quand des gens sont en danger de mort…

Dans le premier tome de cette jolie bande dessinée, on fait ainsi la connaissance de ces trois enfants «presque-comme-les-autres» qui ont été abandonnés par leurs parents sur Terre. Débrouillards, courageux, ils sont particulièrement attachants et on a très envie de savoir pourquoi diable ils vivent seuls et d’où leur viennent ces pouvoirs. L’illustration, très fraîche, fait la part belle aux couleurs chaudes qui contrastent avec le bleu céleste de la couverture.

Librairie La Mandragore à Chalon sur Saône

Décliner les parties du corps, nommer, repérer... Voilà un thème souvent abordé dans les ouvrages destinés à la petite enfance. Emma Adbage relève et renouvèle l'exercice avec brio dans cette série de petits formats tout carton édités chez Cambourakis. Chaque volume est consacré à une partie du corps : le nez, les pieds, le ventre... avec la même question au début de l'album : «Petits pieds ! Qu'avez-vous fait aujourd'hui ?» Car ici le corps est en action. Il bouge, remue, ressent, au gré de la journée, des rencontres, des lieux... au rythme du quotidien !

Et quelle aventure pour de si petits pieds : marcher en équilibre, piétiner la gadoue ; et que de grands moments pour ce tout petit nez : renifler le museau du chien, éternuer... À sa hauteur, bébé vit déjà de grandes choses.

C'est avec une grande complémentarité qu'Emma Adbage relie son texte aux illustrations : sa ligne semble se tracer sous nos yeux, ici elle est à peine finie, là les couleurs apparaissent déjà, et c'est tout un monde qui s'anime. Le trait, fin et délicat, se tort par endroit donnant vie à des personnages un peu maladroits, parfois de guingois, aux yeux malicieux, au nez retroussé, très dessinés et pourtant si proches de notre réalité.

On y découvre le tout petit toujours accompagné, il est câliné, soigné, mouché... Papa, maman, un copain ou le chien ne sont jamais très loin ! Des ouvrages adorables, pleins d'humour et de sincérité.

Lucie Charrier, librairie les Enfants Terribles à Nantes

Dans ce recueil, nulle réponse mais une foule de questions, rigolotes, décalées, poétiques ou philosophiques et parfois un peu tout ça à la fois.
- Le hibou est-il chouette ?
- Peux-tu sauter jusqu’au ciel ?
- Penses-tu que les montagnes ont une âme ?
- Le cerf peut-il devenir arbre ?
- A quoi rêvent les fleurs ?
C’est plein de charme, non ? Davantage encore quand on sait que ce joli texte fait écho aux magnifique travail de Rascal qui nous propose une fois encore une composition graphique très raffinée où se mêlent photos et illustrations.

On retrouve ici un peu de la candeur des questions d’enfants mais aussi un véritable jeu d’aller-retour entre le texte et l’image, l’un et l’autre se questionnant ou se faisant écho.

Si l’on y regarde de plus près on perçoit les subtiles correspondances qui s’établissent entre les pages, rappel d’une couleur, d’une forme, d’un thème ou juste d’une émotion.

C’est un album inclassable évidemment, c’est ça qui est bien d’ailleurs. Des sortes de miscellanées graphiques et littéraires (ça fait longtemps que je voulais caser ce mot, je suis pas mécontente !).

A mon sens on y trouve un parfait exemple de dialogue entre le texte et l’image.

C’est à grappiller par petits bouts, à feuilleter au hasard ou à lire en continu. Libre à vous de répondre ou non aux questions.

Véro, Librairie La Boîte à Histoires à Marseille

(Mention «Librairies Sorcières - Roman ado» aux Pépites du Salon 2015) - Ils ont 13 ans, portent des prénoms jumeaux et ce matin là, sans raison particulière, se mettent à courir. À courir pour voir lequel des deux est le plus rapide, pour sortir de leur environnement lugubre, pour sécher le cours d’arts plastiques… et ils ne peuvent plus s’arrêter. Rapidement ils se moquent de savoir qui est le premier, la douleur et la fatigue prennent le pas sur le jeu, le ciel et la nature remplacent les immeubles et les zones commerciales… et ils ne s’arrêtent toujours pas.

Le chemin parcouru par ces deux là est impressionnant, aussi bien sur la carte que dans leur esprit. Jusqu’ici spectateurs de leur propre vie, ils en deviennent acteur, un peu par hasard, par étourderie et que pas à pas, foulée par foulée, ils changent leur monde et le regard des autres sur celui ci.

Cette histoire très bien écrite est celle d’enfants victimes de leur environnement familial et social, celle de notre société contemporaine où le cadre de vie est maltraité, entre cité et supermarché. C’est l’histoire de chaque lecteur, qui à sa mesure peut certainement changer sa vie, ou en tout cas se redresser et infléchir sa trajectoire, avec ou sans chaussures de course…

Cette année, les Librairies Sorcières ont décerné leurs mentions lors de la remise des Pépites du Salon, pour 4 ouvrages qui ont eu leur préférence parmi les finalistes: Les Sauvages de Mélanie Rutten (Mention Librairies Sorcières Album), De cape et de mots de Flore Vesco (Mention Librairies Sorcières Roman 9/12), Aussi loin que possible d'Éric Pessan (Mention Librairies Sorcières Roman Ado), La Grande Histoire du monde arabe de François Reynaert et Laura Fanelli (Mention Librairies Sorcières Documentaire). Voir leur présentation ici